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« XIII », une bande dessinée nourrie aux théories du complot

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Crédits : éditions Dargaud

Le dessinateur belge William Van Cutsem, dit William Vance, est mort le 14 mai dernier à l’âge de 82 ans. Il était une des figures majeures de la bande dessinée belge. Il avait dessiné des marins (Howard Flynn, Bruce J. Hawker), des aventuriers (Bob Morane, Bruno Brazil), des chevaliers (Ramiro, Roderic), des cow-boys (Ringo, Marshall Blueberry)… mais c’est grâce à un amnésique qu’il restera à jamais gravé dans nos mémoires.

C’est à Jean Van Hamme que l’on doit le scénario de cette longue suite de conjurations-gigognes. Le scénariste belge a bien compris ce ressort essentiel : l’enjeu d’un complot, c’est la dissimulation. À commencer par le nom – inconnu – de son personnage, un patronyme dont il changea plus d’une douzaine de fois car, on s’en aperçoit au fil des histoires de l’homme à la tempe grise : la vérité est toujours ailleurs. Vance a dessiné les 19 premiers albums de la série (qui en comporte 24 à ce jour, auxquels on ajoute 13 spin-of « XIII Mystery » qui creusent l’identité des personnages secondaires) avant d’être frappé… d’un Alzheimer qui l’empêche de dessiner. Ces premiers épisodes se résument à cette seule question dont la formulation ontologique a fait florès : « De qui XIII est le nom ? »

Son chiffre tatoué ne lui porte pas bonheur : il lui attire immanquablement des emmerdes dont il ignore l’origine mais qui sont colossales : on l’accuse d’avoir assassiné un président, de chercher à renverser un gouvernement, et mille autres turpitudes, accusations desquelles il arrive à s’échapper avec l’habileté d’une anguille ! Il est d’autant plus en danger que la conjuration des XX, dont il est un membre estampillé, cherche à lui faire la peau.

Un aristocrate du complot

D’après Jean Van Hamme, « L’assassinat du Président Kennedy est bien entendu la référence. Comme pour le 11 septembre, c’était un choc. Kennedy, avec tous les défauts que l’on a découverts plus tard, représentait quelque chose de totalement inhabituel dans la conception de notre politique occidentale : il était jeune, il était beau et c’était le premier président, en France ou aux États-Unis, qui était glamour. L’assassinat d’un président par un malheureux amnésique que l’on accuse de cet assassinat et qui ne sait pas lui-même s’il en est véritablement l’auteur, c’était un point de départ assez formidable puisqu’il allait devoir accomplir deux choses : d’une part, essayer de retrouver qui il était et, d’autre part, chercher si possible à s’innocenter alors qu’il ne sait pas s’il est coupable ou non… » *

De ce fantasme kennedien, développé au moment où le Britannique Alan Moore pose pour sa part, dans Watchmen (1986, soit deux ans après la naissance de XIII), cette question fondamentale : « – Qui garde les gardiens ? », Van Hamme invente une sorte d’oligarchie secrète – le complot des XX – alliance d’intérêts privés complotant contre une fierté américaine qui a montré depuis combien elle était fragile : la démocratie. Avec cette interrogation qui a aujourd’hui une drôle de résonance dans l’actualité : qu’adviendrait-il si une clique fasciste venait à prendre le contrôle de la nation la plus puissante du monde ?

Dans le cycle qui succède aux 19 aventures de XIII créées par Jean Van Hamme, le nouveau scénariste de la série, Yves Sente, imagine que XIII, alias Jason Mac Lane, serait un descendant de l’un des passagers du Mayflower issu en droite ligne d’un fils miraculé de la reine Elisabeth 1ère d’Angleterre, la fameuse « Reine vierge ». Une filiation qui fait de notre héros un aristocrate du complotisme quasiment de droit divin.

 

Entretien avec Didier Pasamonik, XIII, dans les coulisses d’une œuvre mythique, Hors Série L’Express BD, Paris, octobre 2015.


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